La Commission européenne s’apprête à revoir en profondeur les règles de reporting social et environnemental. Objectif affiché : simplifier la vie des entreprises en réduisant la charge administrative. Mais derrière cette volonté de rationalisation, de nombreuses voix alertent sur un possible recul de la transparence et de la responsabilité des acteurs économiques.
Selon le projet en discussion, la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) ne s’appliquerait plus qu’aux groupes de plus de 1 000 salariés. Une inflexion majeure qui exclurait une très large majorité des sociétés européennes. Parallèlement, la directive sur la diligence raisonnée (CSDDD), qui devait obliger les entreprises à surveiller l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement, serait repoussée à 2028 et recentrée sur les seuls fournisseurs directs.
Ces ajustements représentent, selon Bruxelles, une économie de plusieurs milliards d’euros pour les entreprises. Mais ils pourraient aussi affaiblir la qualité des données ESG (environnement, social, gouvernance) sur lesquelles s’appuient investisseurs, régulateurs et consommateurs.
Au-delà des chiffres, c’est un choix de société qui se dessine. L’Union européenne veut-elle privilégier la compétitivité en assouplissant ses contraintes, au risque d’affaiblir son ambition climatique ? Ou maintenir un haut niveau d’exigence quitte à alourdir les coûts de conformité ?
Plusieurs questions demeurent en suspens :
- L’Europe peut-elle encore se présenter comme chef de file mondial de la transparence extra-financière si ses règles sont assouplies ?
- Cette réforme consacre-t-elle la victoire des lobbies économiques sur les engagements climatiques ?
- En excluant PME et ETI, n’instaure-t-on pas un système à deux vitesses, générateur de distorsions de concurrence ?
- Comment garantir la comparabilité et la fiabilité des données si le périmètre se réduit ?
- Enfin, quels risques contentieux et réputationnels pour les entreprises qui publieraient demain des données partielles ou trop générales ?
Derrière la réforme technique, c’est donc l’avenir du modèle européen de durabilité qui est en jeu.
à partir de 3,00 € par mois
pour un accès intégral au site et à nos services
0 COMMENTAIRE(S)