Alors que le Salon de l’Agriculture approche et que la tension dans le monde agricole reste vive, le Sénat s’apprête à adopter, mardi, la loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture. Pourtant, selon un rapport publié lundi 17 février par Terre de Liens, la France aurait d’ores et déjà perdu sa capacité à nourrir sa population.
Une souveraineté alimentaire illusoire
Avec un potentiel nourricier théorique de 130 %, la France pourrait produire suffisamment pour couvrir ses besoins. Mais les chiffres cachent une réalité bien différente : si le pays exporte la production de 43 % de ses terres agricoles (12 millions d’hectares), il doit en parallèle importer l’équivalent de 10 millions d’hectares de denrées alimentaires, soit la surface de l’Islande.
Résultat, la surface réellement nourricière en France tombe à 2 100 m² par habitant, là où il en faudrait le double pour assurer l’autosuffisance alimentaire.
Cette dépendance aux importations se traduit par des incohérences flagrantes. Par exemple, malgré 250 000 hectares de blé dur cultivés chaque année, de quoi produire 15 kg de pâtes par habitant, la France exporte la majorité de cette production et importe les trois quarts des pâtes et semoules consommées sur son territoire.
Autre exemple : le secteur laitier. Tandis que Lactalis réduit sa collecte de lait en France (-9 %), laissant sur le carreau des centaines d’éleveurs, le groupe mise sur le lait en poudre néo-zélandais, facilité par un récent accord de libre-échange.
Une agriculture tournée vers l’export, au détriment des Français
Depuis 20 ans, les importations alimentaires françaises ont doublé. La France, tout en restant une puissance agricole, est devenue dépendante des importations pour nourrir sa population, tandis que son modèle productif repose sur des intrants importés et des exportations massives.
Dans son rapport, Terre de Liens dénonce 75 ans de déconnexion entre agriculture et alimentation. Alors que les agriculteurs se battent pour des revenus dignes face à une concurrence mondiale écrasante, la précarité alimentaire touche de plus en plus de Français et les coûts sanitaires liés à l’alimentation explosent.
À l’heure où le gouvernement défend une nouvelle loi pour “préserver” la souveraineté alimentaire, Terre de Liens tire la sonnette d’alarme : il ne s’agit plus de la protéger, mais de la reconstruire. L’organisation appelle à une mise en cohérence urgente entre production agricole et besoins alimentaires, afin que la France redevienne réellement capable de nourrir sa population.
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